Pleins de vie – John Fante [1952]

Dans Pleins de vie, on suit les tribulations de l’écrivain John Fante et de sa femme Joyce enceinte de leur premier enfant. Chacun des deux exprime les émotions que lui fait vivre cette grossesse sans aucune censure, ce qui est en soi assez comique. Un jour, Joyce passe à travers le plancher de la cuisine rongé par les thermites. John demande alors à son père, un immigré italien sans éducation et alcoolique, de l’aider pour cette réparation. Il s’ensuit une série de déboires comiques et touchants.

Cette histoire à première vue anodine est portée par une écriture extraordinairement ressentie. Fante ne se contente pas de remplir habilement des pages de mots, il nous plonge dans l’émotion des personnages et on vit l’histoire avec eux. Pour ce faire, il place précisément les émotions où elles doivent aller en donnant juste ce qu’il faut de détails pour que la lecture demeure organique et instinctive. Expert du non-dit et de la psychologie, Fante fait ainsi participer son lecteur.

D’apparence banale, l’écriture de Fante est pourtant complexe car elle cache une mise en scène virtuelle et requiert une grande économie de moyens pour fonctionner. Et ça, c’est indéniablement la marque d’un grand écrivain car ça demande une rigueur extrême et une sacrée dose d’humilité. En effet, ça donne une écriture moins spectaculaire au premier abord car elle n’est pas là pour briller mais plutôt pour servir les personnages. Et ce n’est pas en écrivant de cette façon qu’on obtient des prix littéraires.

Fante est d’ailleurs mort dans l’anonymat et aveugle. Si ce n’avait été de Bukowski qui suggéra à son éditeur —Black Sparrow Press— de rééditer les livres de Fante, personne ne parlerait plus de lui aujourd’hui. Et ce serait une sacrée perte pour la littérature car de tels écrivains sont archi rares !

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